La colère le secouait, comme un chien qui massacrerait un lapin. La rage le chevauchait comme un brutal cavalier sa jument, les éperons enfoncés dans les flancs. Une Furie antique nichait dans son cerveau, exaspérant les neurones jusqu’à la folie.

Mais c’étaient aussi ses défenseurs, qui l’empêchaient de sombrer dans le noir. Comment pouvait-il amener cet enfant violenté, humilié, vers l’âge adulte sans des alliés costauds à faire peur ?

Ses accès restaient verbaux. Il ne faisait qu’envisager, constamment, la violence physique. « Si je la vois dans la rue, je lui fous ma canne dans la gueule. »

Pénible, le bonhomme ? Non, car il ne râlait pas, il fulminait, et son énergie était vivifiante. La moindre rencontre du quotidien, dans la rue, dans l’escalier, dans les magasins et les administrations, devenait, lorsqu’il la racontait, un affrontement homérique. Ceux qui l’entouraient, qui l’avaient entouré, étaient dépeints dans toute leur férocité.

L’histoire s’est terminée. Les maladies s’affairaient en lui, chacune réclamant son attention à grands cris de souffrance. Enfin, dans la grande fatigue du mal, il trouvait le calme. Son énergie le quittait, et il ne lui en restait pas assez pour pester. La paix. A la fin, il ouvrait ses yeux au visiteur et souriait. «C’était long, je vous attendais.»

Epilogue

Devant l’église, des personnes que je ne connais pas avancent vers l’entrée. A les regarder, j’arrive à identifier quelques uns des personnages de ces drames que j’avais appris. Ces ogres, ces injustes, ces abusifs, redevenaient, dans leur sombre présence à son enterrement, ce qu’ils avaient été en dehors de ses charges, des êtres du quotidien.

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