Archives pour août 10th, 2009


Je n’ai jamais aimé le football!

Lorsque j’étais jeune, à Tunis, les chefs de bandes me choisissaient en dernier dans le partage des joueurs, comme « bouche-trou », généralement comme arrière, voué aux gémonies dès que l’adversaire marquait un but et menacé aussitôt d’exclusion. Le souvenir que j’en ai gardé est celui d’un sport violent, opposant deux bandes de quartiers différents, ou bien pire, celles ségrégationnistes des « arabes » contre les « français », ce mot désignant en fait un ensemble hétéroclite d’italiens, de maltais, de juifs et de français « de souche » (sic), tous unis pour l’occasion. Il faut dire que nos actuelles banlieues dites « difficiles » apparaitraient comme de paisibles et riants quartiers résidentiels comparés à celui que j’habitais. La partie ne se finissait jamais sans une bagarre générale, provoquée par une faute ou un but contesté, les poteaux, de simples tas de vêtements, offrant une incertitude propice aux contestations. Ces batailles de fin de match avaient lieu à coup de pierres ou de frondes. Les belligérants s’éparpillaient dans les terrains vagues qui entouraient la cimenterie, s’abritant derrière les wagons qui y stationnaient en attente de chargement, puisant dans le ballast des voies de chemin de fer des munitions illimitées.

Je repensais à cette époque lointaine dans le taxi qui m’amenait de l’aéroport du Galeao vers mon hôtel Méridien de Copacabana et je maudissais encore ce football en entendant la radio du taxi qui hurlait, m’empêchant de savourer la vue sur la célèbre baie de Rio . Il s’agissait d’un match entre deux équipes locales et visiblement le chauffeur et le speaker avaient pris le même parti pour l’une d’elle car chaque fois qu’elle s’approchait des buts adverses le ton montait. Le conducteur se retournait alors vers moi pour que je participe à la joie collective. Le jeu habituel des chauffeurs de Rio qui consiste à essayer d’écraser les piétons traversant au feu vert par défi envers les automobilistes était corsé par les quelques secondes où le conducteur quittait la route des yeux dans ses moments d’intense excitation. Heureusement, la fin du parcours, sur la splendide avenida Atlantica, se termina dans le calme et la tristesse à la suite d’un but marqué par l’équipe adverse, ce qui me permit de regarder en toute quiétude les splendides garotas au corps de miel sombre se déhanchant le long de la route .

Enfin je découvris un jour la quintessence de la violence du jeu de balle chez les mayas lorsque je visitai le site archéologique de Chichen Itza au Yucatan. Voilà des gens qui avaient compris bien avant notre ère ce que ces jeux recélaient de cruauté et d’animosité refoulées entre les peuples. Portant au plus haut le suspense des spectateurs, ils pratiquaient ce que que le règlement du football moderne appelle « la mort subite » et dans leur cas ce n’était pas un vain mot! Cette règle ne s’applique de nos jours qu’à la période des « prolongations », après que les équipes n’aient pues se départager dans le temps réglementaire. Elle consiste à interrompre le match au premier but marqué et désigner aussitôt le vainqueur, ce que certains de nos commentateurs patentés considèrent comme cruel! Nos mayas, il y a plus de 2000 ans en avaient fait la règle unique du jeu de balle. Dès qu’une des équipes réussissait à faire passer la balle dans le but (un grand anneau de pierre situé à quelques mètres de hauteur) la partie se terminait. Le mot « mort subite » n’était pas alors, en l’occurrence, une simple figure de style! En effet : dans les minutes qui suivaient l’équipe perdante était sacrifiée illico et sur le champ avec des raffinements dignes des meilleurs films gore! Voilà une méthode expéditive que nos hooligans modernes apprécieraient certainement, bien que cet aller simple les privent du fameux « match retour » et des promesses de vengeances associées!

Mais, me direz-vous, pourquoi stigmatiser le football et oublier cet autre jeu de balle, ovale pour en rendre les rebonds plus diaboliques, je veux parler du rugby ? Je ne sais pas… Cela est du domaine de l’irrationnel sans doute, à moins que ce soit parce que ce dernier est un « jeu de voyous joué par des gentlemen » alors que le football serait plutôt l’inverse ?



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