Archive de l'auteur

Un magasin d’antiquités, ici, là, ou ailleurs.. Secrets d’alcôve d’hier, senteurs de grenier, une méridienne aux tons passés pour belle alanguie. Quelques marches encore, accrochés aux murs des lithographies, dessins au fusain. Une commode ventrue, poignées dorées. Une vieille table, des couverts en argent, des cristaux de Bohême… Des verreries de Gallé, un vieux marbre fêlé.. Posé à même le sol, un trumeau Louis XVI, un chat, puis deux, puis trois, observent leur reflet. Douce patine du temps, et la teinte unique des glaces au mercure, chef d’oeuvre des maîtres vénitiens. Un chat d’albâtre,un de plâtre,un de bronze mordoré. Une cage à oiseaux, inventaire à la “Prévert”.

Ce miroir, qui m’attire… Les chats.. et ce miroir entre ombre et lumière, entre rêve et réalité. Suis je déjà entrée, dans ce miroir?  de l’autre côté? dans un autre lieu? une autre vie? Ce chat l’oeil en coin mystérieux, était il dans une autre époque? est-il vraiment la réincarnation d’une personne que j’ai connu, voire aimé? et ce sentiment de vécu, attaché à un lieu que je ne connais pas. Et ce livre, qui je sais m’avait appartenu autrefois. Ce Littré, qui était sur ma table de travail. Es ce un “jeu” de miroir ou un “je” de miroir? et sans craindre les anachronismes, j’ai le souvenir du jardin de Ronsard, et du siècle des Lumières. J’étais autrefois saute-ruisseau au temps d’Alexandre Dumas. Bien plus tard, j’errai à Paris au service presse de le rue Sébastien Bottin… Dans une autre vie j’ai aimé un Dandy, me perdant dans l’odeur de sa chemise à jabot. Constance et inconstance. Ce qui est moi, et ne le sera plus la seconde d’aprés. Ce que j’essaie d’écrire, et qui déjà m’échappe, comme la “Branloire Pérenne” de Michel de Montaigne.

Dix ans déjà, forte d’un premier manuscrit, je tentais l’envoi dans une grande maison d’édition. L’éditeur avait prit soin de me répondre: ” vous dîtes, qu’il y a deux personnes en vous… alors ce serait la troisième qui écrirait..” Ombre et lumiére. Dualité toujours. Vie et ténébres. Reflets et apparences. Jeux de je. L’écrivain au chat semblable, avec ses multiples vies. Et me voici entre ” Splenn et Idéal” “La belle Dorothée” et souvenir d’une chanson d’aprés midi “tes hanches sont amoureuses- de ton dos et de tes seins- et tu ravis les coussins- par tes poses langoureuses.” Charles Baudelaire.

Je peux d’un mot facile brosser un portrait, me laisser porter par l’imaginaire, me travestir entre mensonges et vérités.. je peux, d’un trait de crayon changer de prose en poésie. Osciller entre le Yin et le Yang. Et je peux être belle, autant que laide. Aimante et perfide. Je peux être douce et soyeuse, et d’un coup de griffe lacérer un joli coussin de soie… pour un mot qui ne vient pas.


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En ce temps là, je revenais fillette sautillante, du marché de Soissons, épuisette à papillons à la main, telle Diane chasseresse. Ma grand-mère avait fait ses emplettes, et m’avait acheté au marchand à “cent balles” cette épuisette au milieu d’une quincaillerie, objets en tout genre qui n’étaient vendus pas cher.

C’était un temps, ou le quartier Lamartine, et la plaine Maupas étaient encore un formidable terrain de jeux,royaume des papillons, des sauterelles et des fourmis. J’avais les champs à portée de mollets solides, les arbres et les pâtures m’entouraient. Ma grand-mère, bonté faite femme, me gâtait de milles attentions. Mon enfance sentait la tarte aux pommes cuite au feu de bois, les quatre heures avec de magnifiques tartines de confiture, les tasses de chocolat brûlant,l’odeur des crêpes sucrées et la magie des gaufres…

Au jardin de ma grand-mère se dressaient rouges et flamboyantes de somptueuses pivoines. Elles refleurissaient, tous les ans. Et pour moi enfant, j’imaginais qu’il en était ainsi depuis la nuit des temps.Ces fleurs étaient particulières. Elles fleurissaient, autrefois dans un autre jardin… celui de mon arrière grand-mère. C’était impressionnant et rassurant cette filiation, ces racines qui s’inscrivaient dans ces simples fleurs. Ma grand-mère me parlait ainsi de sa mère, en surveillant la floraison. Ce n’était pas triste, puisque les pivoines étaient toujours vivantes et belles.

Le temps est passé…Moi, partie dans d’autres lieux, ma grand-mère vieillissant… Un placement en maison de retraite, à la suite d’une chute, fût décidé par ses enfants. Je ne pouvais rien, je n’étais que sa petite fille. Les premières semaines, les premiers mois, elle me répétait sans cesse:”Je ne sais pas quand je vais pouvoir rentrer, dans ma maison” Elle me parlait de son jardin et de son chien, entourée de vieux séniles répétant, hurlant toute la journée , l’une ” je veux rentrer, chez mes enfants” l’autre: “maman”…je la vis décliner…parlant bien elle aussi un peu toute seule… je sentais, que son esprit devenait confus, que les événements étaient mélangés. Les morts étaient prés d’elle, tandis qu’elle ne se souvenait plus que j’avais des enfants. Je me décidais un jour à rencontrer une soignante qui s’occupait d’elle:” C’est de la démence, dont souffre votre grand-mére me dit-elle”.

Je la retrouvais sommeillant:” Ah! c’est toi, celà va faire la Une du Journal l’Union!” pour me taquiner d’une absence trop longue. Elle avait changé, recrocquevillée, les cheveux un peu plus blancs. De la démence m’avait-on dit là haut. Je prenais la main de ma grand-mère, et les années n’étaient pas passées. J’étais toujours sa petite fille, et celà elle le savait toujours. Le vent agitait au loin la cime des arbres, et celà semblait l’inquiéter. Il y avait au centre de la table, un joli bouquet de pivoines rougeet je tentais de faire surgir des brumes de sa mémoire, cette douce évocation de notre histoire. Elle regarda les fleurs, ne sachant à cet instant si celà était bon à manger, à regarder, et pourquoi celà se trouvait ici.

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Je la vois. Assise.Jambes épilées, nettes. Brushing impeccable. Habillée simplement, classe lui répéte souvent sa meilleure amie.
Maquillage discret, et la bouche ourlée d’un rouge corail. Est- elle belle? simplement vivante…
Elle attend son tour, a pris son ticket pour la file d’attente et observe discrétement les gens présents dans ces locaux ASSEDIC.

Un homme sans âge, le cheveu gras, une grande frange ramenée sur son crâne chauve. Elle l’a déjà vu… ah! oui, il faisait ses courses, la calculette à la main, digne avec son panier maigrement rempli.
Et cette grosse dame dans un coin, et cette grande fille élancée au regard si dur. Des gens anonymes, inconnus. Elle regarde, croque des portraits comme un peintre.

Cette salle d’attente lui paraît tout à coup insupportable. C’est à s’y méprendre, comme l’attente à l’hôpital. Atmosphére glacée, tendue et vos entrailles qui gargouillent. Pauvres sourires en coin. On s’épie, on se jauge, on se scrute.
Réplique du film “Pédale Douce” : ” Vous en êtes?”
Tous là, dans ce même attentisme, cette attente froide et glacée comme un bloc opératoire.

“Vous en êtes ?” oui, je suis au chômage, ou j’ai eu un cancer. N’est ce pas la même chose?

Tout à coup pourri, plus bon à rien,rongé et la vie entre parenthéses. Traitements, chimio, rayons, chrirurgie et autres réjouissances.

C.V, lettres de motivation, ateliers de n’importe quoi, qu’importe le titre pompeux, puisque celà ne sert à rien.
Rien qu’à attendre, être en sursis.
Et cette image dans la glace est ce bien moi?
Moi, défait, amaigri,cicatrisé, blessé, mort dix fois et réssuscité tout autant.

Moi, le malade victime aussi d’un doux euphémisme qui risque bientôt de faire de moi ” pas un technicien de surface”, mais un mort pour longue maladie. Ni fleurs. Ni couronnes. Et l’ASSEDIC comme enterrement de 1ére classe.

Et ces gens qui vous regarde d’un air condescendant. Ces voisins dont la porte se ferme toujours trop tôt.
Et ce courage qu’il faut aller puiser au tréfonds de soi.
Croire que demain sera meilleur, et les lâches et les couards qui vous abandonnent…
Et cette compassion affichée de toute part…

Et ces regards dans lesquels vous ne voudriez plus vous voir…
Es ce la vie qui vous abandonne?
On est plus qu’un reflet, le miroir de la peur des autres.
Les gens vous regarde. La jeune femme aux jambes épilées, s’en fout. Elle attend. Un conseiller qui ne verra rien. Un conseiller qui n’a pas été formé à ” l’humain”.

Est elle belle et vivante?
Elle affiche ses jambes parfaites. Image lisse. Et le chagrin dedans.

Chômage et maladie, dit elle en souriant: “la double peine”.

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Avant propos:  C’est ici, le souvenir d’une balade sur les chemins de  la première guerre mondiale, que je veux vous conter. C’est le souvenir d’entendre presque un siècle plus tard, les âmes qui hantent encore  la Picardie, quand le vent s’engouffre entre les croix des cimetières militaires, et  sur le plateau de Californie.

Sans oublier ce triste refrain, qui m’a accompagné tout au long de l’écriture: AUTEUR INCONNU “  La Chanson de Craonne”

Enfin, ERICH MARIA REMARQUE “A l’OUEST RIEN DE NOUVEAU:”
“Pardonne moi, camarade: comment as tu pu être mon ennemi? Si nous jetons ces armes et cet uniforme, tu pourrais être mon frère.”

Karl ou Walter
Etrangers a cette terre
Sans vie, face écrasée
Les vivants gueules cassées.

A Parcy Tigny, ailleurs, ici,
Au plateau de Californie
Et le vieux Craonne
Plus de maisons, plus personne.

Avant cette pluie d’obus,
Te souviens-tu?
Les rires d’Adelaîde et Victoire
Chemin de Dames devenu si noir.

J’avais là bas,
Une belle, que je prenais dans mes bras.
J’avais de l’autre côté du Rhin,
Une mère rongée de chagrin.

Dans le matin blême,
Le souvenir de Brême,
Et Berlin,
Et ses putains.

Quatre ans déjà,
Comme aux Eparges, là bas.
Le feu, la mitraille,
L’odeur des entrailles.

Que restera-t-il?
Un chant, un hymne.
Croix de bois, Croix de fer,
Et ces cimetières.

Passant anonymne,
Ecoute de l’abîme,
Ce chant lugubre de nos jeunes années,
Mortes avant d’aimer.

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Anne PHILIPE:  “Le Temps d’un soupir: ” Longtemps, j’ai su qu’à partir de notre amour, nous pourrions construire-une maison-des enfants….”

J’étais alors en quête d’une maison. La découverte d’une photographie, par le biais d’un site Internet, me renvoyait tout à coup à une foultitude de souvenirs. C’était la page blanche retrouvée de l’écolière et de la collégienne. C’était le libellé de la rédaction, qu’il fallait laisser mûrir à l’intérieur de soi, pour trouver tout à coup l’inspiration inespérée. C’était encore, la joie de griffonner à nouveau la page blanche. Les maisons sont comme des livres, elles sont comme nos vies: des maisons que l’on habite, ou l’on espère, des maisons pensées ou rêvées, des maisons habitées ou quittées…Elles sont des pages de livres écrites, présentes ou à venir, quelquefois perdues et qui ne reviendront plus.

Je venais de mettre en vente une maison que j’avais aimée. J’étais en chasse d’un autre lieu. Ce n’étais pas simple, j’avais visité quelques endroits, mais aucune encore ne correspondait à mes attentes. Et puis…

C’était un jour de Novembre, comme il en fait souvent en Picardie déjà froid et ce brouillard humide.L’hiver semblait déjà s’installer. J’entrais dans le jardin d’une maison que je convoitais depuis quelques semaines. Au sol les feuilles étaient racornies, bordées d’une dentelle de froid blanche, tandis que le potager au loin affichait la triste silhouette des choux  de Bruxelles roidis sous les assauts du gel précoce. Mes chaussures crissaient dans cette allée, bordée d’arbres qui devaient être si beaux au printemps et à l’automne.

J’entrais enfin dans cette maison… c’était surprenant… tout de suite, cette chaleur des parquets anciens en chêne, et le soleil déjà qui semblait timidement vouloir percer au travers des grands volets. La maison n’avait pas encore été vidée totalement de ses meubles. D’instinct, je me dirigeais dans un salon bibliothèque ou dormaient encore des livres, qu’une jolie propriétaire avait dû parcourir nonchalamment. Un fauteuil crapaud, d’un bleu délavé par un ciel de lune, semblait m’attendre. Je ne pu résister à l’envie de m’assoir, comme pour prendre possession de cet endroit. Il est des maisons ou d’instinct, on se sent bien comme si l’on ya avit toujours habité, comme si les murs tot à coup protecteur, vous faisaient oublier quelque peu la vie du dehors, en vous berçant d’une langueur originelle. Les maisons ont une âme, pour qui sait être à l’écout, pour celui qui cherche au delà de notre temps humain. Sont elles des lieux de vie? sont elles déjà l’ébauche de nos tombeaux?

Je veux croire en des lieux de vie, même si celà me paraît éphémère. Installée dans ce fauteuil, je rêvais à une jeune femme… une robe bleue, évanescente… je me pelotonnais dans mon grand châle, la rêverie s’était emparée de mon corps. Il flottait encore dans l’air un parfum de femme, une fragrance de Chamade de Guerlain qui samblait envahir encore l’atmosphère.

Je me laissais envahir par les bruits ténus de la maison. Des enfants avaient joués là, et je me souvenais avec exactitude du dernier Noel. On avait dressé un sapin immense dans le salon, il y avait eu des rires, et des jeux sans fin. On s’était poursuivi dans la maison, les cousins en renfort avait grossi cette meute joyeuse et tumultueuse déguisée en lutins facétieux, en indiens bariolés, chevauchants pour les plus petits d’éternerls chevaux à bascules. On s’était émerveillé d’un temps qui semblait ne pas devoir s’enfuir, ni s’échapper…

Puis, un jour le bruit des enfants s’en était allé.

Je sortais de ma douce torpeur, pour accéder à l’étage. C’était plus surprenant encore, un lit Gustavien sous un ciel de lit en toile de Jouy bleue, trônait dans cette superbe chambre.Je m’en voulais tout à coup de déranger une intimité si présente. C’était un lit d’amoureuse, un lit ou l’on avait aimé, un lit de chuchotements, et de soupirs de volupté.Je n’avais à cet instant même plus besoin d’aller plus loin dans ma visite. V’était dans cette maison que j’allais vivre. Elle saurait me donner encore du bonheur, et je saurai lui rendre vie pour des années encore.Un jour, une jeune femme viendrai à son tour, en quête peut être d’un endroit unique…

Elle ferait sienne, cette maison à pas de moineaux. Les arbres du jardin abriteraient les déjeuners d’été, tandis que le feu crépitera dans la cheminée dés l’automne. Le piano résonnerait d’une Marche Turque ou d’un air mélancolique de Satie.

De la cuisine s’échapperait des effluves sucrées et toujours des rires d’enfants. IL y aurait des goûters d’anniversaire et des repas de fiançailles…

Des rires, des joies et des larmes, encore et toujours. Et la vie qui passe, nous prend et nous emporte.

Je me suis réveillée ce matin, et j’avais fait ce rêve…

Une maison en Picardie, peut être un jour… peut être à nouveau…

Avec cette lumière et l’éclat des forêtes d’automne. Avec mes aieux qui dorment là bas.

Avec mes racines profondes ancrées dans les plaines Picardes. Une maison m’attend…une maison de famille. Mon rêve me l’a dit.

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