Archives pour septembre, 2008

La colère le secouait, comme un chien qui massacrerait un lapin. La rage le chevauchait comme un brutal cavalier sa jument, les éperons enfoncés dans les flancs. Une Furie antique nichait dans son cerveau, exaspérant les neurones jusqu’à la folie.

Mais c’étaient aussi ses défenseurs, qui l’empêchaient de sombrer dans le noir. Comment pouvait-il amener cet enfant violenté, humilié, vers l’âge adulte sans des alliés costauds à faire peur ?

Ses accès restaient verbaux. Il ne faisait qu’envisager, constamment, la violence physique. « Si je la vois dans la rue, je lui fous ma canne dans la gueule. »

Pénible, le bonhomme ? Non, car il ne râlait pas, il fulminait, et son énergie était vivifiante. La moindre rencontre du quotidien, dans la rue, dans l’escalier, dans les magasins et les administrations, devenait, lorsqu’il la racontait, un affrontement homérique. Ceux qui l’entouraient, qui l’avaient entouré, étaient dépeints dans toute leur férocité.

L’histoire s’est terminée. Les maladies s’affairaient en lui, chacune réclamant son attention à grands cris de souffrance. Enfin, dans la grande fatigue du mal, il trouvait le calme. Son énergie le quittait, et il ne lui en restait pas assez pour pester. La paix. A la fin, il ouvrait ses yeux au visiteur et souriait. «C’était long, je vous attendais.»

Epilogue

Devant l’église, des personnes que je ne connais pas avancent vers l’entrée. A les regarder, j’arrive à identifier quelques uns des personnages de ces drames que j’avais appris. Ces ogres, ces injustes, ces abusifs, redevenaient, dans leur sombre présence à son enterrement, ce qu’ils avaient été en dehors de ses charges, des êtres du quotidien.

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Enfin, une église ouverte !

Quittant la chaleur de cette journée d’été, je pénètre dans l’édifice et me baigne dans la fraîcheur du lieu, le recueillement de la nef me saisit. Je m’assieds impressionné par le silence …

Après quelques minutes de méditation, je me lève et avance lentement vers le chœur… Là, sur la gauche… un gisant…Je m’approche …

Soudain une voix caverneuse me surprend :

- Que me veux-tu visiteur ?
Rien, monsieur… j’avance simplement… pour voir !…
Ne m’appelles pas Monsieur…, je suis le Chevalier du Mont !
Le Chevalier du Mont ? mais qui est-ce ?
Je résidais, il y a 600 ans, sur cette paroisse, dans une tour de ce nom, mais il y a longtemps qu’elle a été démolie. Elle n’a pas résisté au temps, ni aux outrages… Tandis que moi, Chevalier, je suis toujours visible, dans cette église où je suis en veille …
Mais, répondis-je, vous n’êtes pas en veille … il n’y a là qu’un enfeu de pierre… Je ne vois aucune trace du vivant sur ce monument…
Détrompe-toi visiteur, j’ai traversé les siècles et les générations ne m’ont pas détruit. Au début nous étions deux … moi du côté Nord, l’autre du côté sud. Mais à la Révolution des brigands sont arrivés dans la paroisse et l’ont décapité …Depuis, il gît au fond de l’église dans un coin, sans tête… Pauvre de lui… Moi, tu vois, je suis entier et je veille …
Mais vous veillez sur quoi ? … les révolutions c’est fini… il n’y a plus de guerres dans nos contrées…
Prends-y garde, visiteur… de vos jours en effet il n’y a plus de guerre avec les armes, mais… il y a la pourriture : la pourriture des ans sur la pierre… la pourriture des vers dans le bois… la pourriture des hommes dans les cœurs…
Et alors, vous gisant de pierre, pardon Chevalier du Mont que pouvez-vous faire contre cette pourriture ,
Je veille te dis-je… je veille à ce que des hommes, passant dans ces lieux soient saisis dans leur cœur et s’animent pour redonner un bel aspect à cette église… Ainsi, en 1833, l’un des maires du village a payé un maçon pour réparer les dégâts causés pas les brigands de la révolution. Ainsi par son exemple, toute une communauté s’est de nouveau rassemblée pour célébrer dans ce lieu saint…
Bravo, Chevalier, bravo… Continuez votre veille… je vous signale, cependant, au cas où vous ne l’auriez pas vu… que les sculptures des arcatures de la façade sont bien usées par la pourriture du temps…
Ne te moques pas visiteur…Je sais par expérience, qu’il faut du temps pour que les vivants, dont tu fais partie… se bougent dans leur corps et dans leur cœur. Ils ont tellement de choses à faire dans leur tête…Mais je ne désespère pas de trouver, parmi eux, ceux qui répareront ces outrages du temps…

J’ai retrouvé la chaleur du jour, laissant le gisant à sa veille…Regardant l’équilibre de cet édifice du XIIème siècle, je me suis dit que… tout compte fait, il remplissait bien son rôle …

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Mon cher Rufin,

Permets moi de t’appeler ainsi car je n’ai pas beaucoup d’occasions de prononcer ce prénom que mes parents ont choisi à ma naissance. En fait je ne connais aucun autre Rufin… A l’école, très tôt, j’ai été en butte à toutes les railleries habituelles sur mon prénom : « couffin »,« Rufin-putain », « rupin », « ruffian », etc…
Les parents devraient faire attention avant d’appeler leurs enfants Rufin, Mégane (surtout s’ils s’appellent Renault), Cajoline ou Plectrude. Mais bon… le mal est fait et tu n’y es pour rien…

Je t’envoie cette photo prise par une collègue de boulot lors de la procession en ton honneur, le 14 juin, à Vregny. Il y a aussi un dénommé Valère qui a sa fête le même jour je crois. Un copain à toi je présume ?
Excuse-moi pour la qualité de la photo, j’ai pris ce qu’il y avait de mieux mais j’avoue que ce n’est pas terrible. Je suis en plein milieu, cheveux courts, costume café-au-lait (ma couleur préférée). Oui… celui qui est juste dans l’axe de la gouttière, là… tu vois ? Tu peux constater que je te suis fidèle!

Pourquoi je m’adresse à toi ? Je sais que le dicton populaire dit qu’il «vaut mieux s’adresser à Dieu qu’à ses saints» mais ce n’est pas faute d’avoir essayé, plusieurs fois d’ailleurs, sans résultat. Oui, je sais, il est pas mal occupé ces temps-ci…mais, soit dit en passant, si on en juge par les résultats, il n’a pas l’air de se fouler beaucoup ! Quant à toi, avec un prénom aussi peu usité, tu ne dois pas être surchargé de sollicitations ?
Bon, venons-en maintenant au fait qui m’amène à m’adresser à toi. En juin, lors du match de football de l’équipe de France où notre équipe nationale a été sortie sans gloire, le sélectionneur (artisan de cette défaite) a saisi l’opportunité de passer à la télé pour demander en mariage Estelle Denis. Qui est-ce ? Allons…Je sais que tu ne suis pas toujours les événements qui se passent sur notre bonne vieille Terre mais quand même!. En la matière tu ne fais pas mieux que ton patron… D’ailleurs, à ce propos, je te signale qu’Il y a même un mécréant (un dénommé Prévert je crois…)qui a modifié le début d’une prière : « Notre Père qui êtes aux cieux, restez-y, etc. ! ». Où je veux en venir ? C’est que je suis fou amoureux d’Estelle ! Je lui ai écrit plusieurs fois des lettres enflammées par l’intermédiaire de M6 (c’est la chaîne de télévision qui l’emploie). Au fait, à propos… est-ce que vous avez la télé, là-Haut ? Après deux mois, tout ce que j’ai eu d’elle c’est une photo dédicacée qui orne maintenant ma table de nuit. Comprends-moi Rufin : ce n’est pas sa photo que je voudrais et ce n’est pas sur la table de nuit que je voudrais qu’elle soit ! Quand je pense qu’un type aussi insignifiant que ce Raymond Domenech (que dis-je « insignifiant »… nuisible, plutôt) profite de la télé pour faire passer ce message à Estelle. Moi j’ai choisi mon Saint Patron, toi en l’occurrence, pour faire l’intermédiaire.
Hein ?(comme on dit chez nous en Picardie), tu ne t’appelle pas « ruffian » ? Oui c’est bien ce que je craignais… jamais là quand on a besoin de vous !
C’est dit : l’année prochaine je vais à Lourdes. La petite Soubirou : en voilà une qui s’y connait en Communication au moins !

Ton dévoué Rufin

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