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Mirka, la jument s’arrête, d’instinct, devant la barrière en bois. Maurice, qui dormait sur les genoux de sa mère, s’éveille :  «  Oui ! nous voilà arrivés ! C’est la maison des vacances ! » La maman, descendue de la calèche pour ouvrir la clôture, le reçoit dans ses bras. Le garçon court, gambade, ivre de bonheur… Au fond du jardin, il se penche pour ramasser une pêche, plus loin…, il cueille une grappe de raisin…

Le papa, lui, a pris Mirka par la bride et l’a conduite vers la grange pour la dételer, l’essuyer avec un bouchon de paille car la bête est en sueur. Il la rentre ensuite à l’étable où il lui donne de l’eau, de l’avoine et du foin.

Dix ans plus tard, Maurice se rappelle de cette jument, paisible, douce… Elle était sa préférée, comme elle l’était aussi de la famille. A chaque visite chez des amis, ou pour aller au marché, Papa, le frère ou les grandes sœurs attelait Mirka au char à bancs et on partait sur les routes, ballotté par les cahots. Le plus souvent, la jument marchait. Elle trottait aussi lorsque le conducteur l’y incitait en la flattant avec les rênes.

Oui Maurice se souvient. A présent c’est à son tour de conduire les chevaux. Quatorze ans, le certificat d’études en poche, il est venu renforcer l’équipe de travail à la ferme familiale. On ne lui a pas laissé le choix ! Toute force mâle est embauchée d’office pour venir aider le père…

Déjà on lui confie la conduite de l’attelage pour les travaux les plus simples : labours à l’automne… hersage et roulage derrière les semis de printemps…

Mener les chevaux, tout un art ! Il faut savoir se faire reconnaître, les rassurer de la voix, les inciter au travail, les calmer lorsque la pression à la tâche est trop forte… Un cheval emballé est un cheval fou ! Il traverse les champs en courant, saute au dessus des clôtures et risque de se blesser comme il pleut blesser ceux qui l’approchent… Habile est celui qui réussit à la calmer et à l’adoucir …

Un attelage de chevaux à la ferme est une richesse ! Les animaux forts, puissants, calmes assurent la force de travail. Leur apprentissage demande du doigté, de l’expérience, car faire reculer un jeune poulain dans les brancards d’une charrette nécessite de la patience, de la fermeté. Il faut donner à l’animal la sécurité, la confiance du maître… Caressé, cajolé, il se laisse guider petit à petit. Peu à peu le couple homme-bête prend de l’assurance… Dans une deuxième étape, le cheval doit s’habituer à travailler en attelage… Mis à côté d’un animal expérimenté, celui-ci prend sa part dans l’apprentissage du nouveau venu : travaillant un peu plus fort, ralentissant l’allure, restant calme à côté d’une jeune bête plus nerveuse…

Maurice, marchant derrière la charrue, acquérait cet art à son tour… Mais là il devait rester attentif pour que le tracé des sillons soit droit, que le soc soit à la bonne profondeur pour ne retourner que la terre arable… Devant lui les chevaux tiraient, tranquillement…. Et tout le calme champêtre les entourait, les englobait… comme dans un tableau de Millet !


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C’était par une belle nuit du mois d’août. J’avais vingt ans. Nous étions allongés sur l’herbe, Mado, ma sœur, et moi sous le ciel allumé de mille étoiles.

Là, sur notre gauche, une étoile filante vient de plonger, elle disparaît derrière le rideau de peupliers…
«  Vite, fais un vœu ! » me dit Mado.
«  Tu y crois, toi à ces sornettes ? » lui rétorquai-je plaisantant à demi.
«  Je n’y crois peut-être pas, mais ce qui est sûr, c’est que si tu n’en fais pas tu ne seras pas exaucé, tandis que si tu en as un, alors… peut-être verra-t-il le jour… »

Je n’ai pas répondu, mais dans ma tête, sûr, j’en avais un : c’était de revoir Minnie !

Minnie ? je l’avais rencontré chez des amis le mois précédent. Tout de suite, son sourire m’avait désarmé. Nous avions passé la semaine ensemble. Visite à droite, visite à gauche, repas au restaurant, pédalo… Ah ! le pédalo ! Tous les deux seuls, sur l’onde… Bien que nos échanges soient restés banals, ce souvenir restait gravé dans ma poitrine, il me faisait mal !…

Avant que nous nous quittions, je lui avais demandé : «  Accepterais-tu que nous nous revoyions,? »
Elle m’avait répondu : «  Non, j’ai déjà un petit copain ! »
Las ! le soleil était devenu gris, d’un coup !
Mais continuant sur ma proposition, je la questionnais : « Alors, plus simplement, puis-je t’écrire ? ». Elle avait, alors dit : «  Oui ! »

Dans cette belle nuit d’été, j’en étais là… Oui le vœu que je formulais derrière l’étoile filante, c’était de revoir Minnie. Mais Mado, ma sœur n’en a rien su !

Une ou deux semaines plus tard, j’eus l’occasion de passer à Lons, son lieu de résidence. Par la fenêtre du train, je scrutais les rues, les quais… Par un heureux hasard peut-être allais-je l’apercevoir ? Mais non rien ! Je retournais dans ma solitude, sous mon ciel gris ! Seule la correspondance me rattachait un peu à elle, occasionnellement…

C’est en septembre que la lettre arriva ! cette lettre où Minnie m’annonçait qu’elle avait rompu avec son petit copain… Du coup, elle acceptait que nous nous retrouvions !
Cette lettre, je l’ai lue et relue et par magie le soleil était revenu plus brillant… le ciel s’éclairait !…

Oh ! merci Mado de m’avoir dit de faire un vœu ! La chance a voulu que cette étoile filante m’apporte le bonheur !


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Refrain : Heigh-ho…Heigh-ho…
J’aimais bien mon boulot
Où est ce bâté gredin,
Qui m’a mis dans son jardin !

Nous étions sept, dans mon conte de fées
Blanche-Neige était notre reine…
A la mine nous allions travailler,
Du matin au soir nous piochions sans peine
Car nous avions son sourire, en fin de journée…

Refrain : Heigh-ho…Heigh-ho…
J’aimais bien mon boulot
Où est ce bâté gredin,
Qui m’a mis dans son jardin !

Et me voilà tout seul, moi Simplet
Planté dans ce jardin, au soleil, à la pluie…
Perchoir des oiseaux, je suis tout crotté…
J’ai froid, j’ai chaud… c’est d’un ennui…
Les gens me regardent et je les fais rigoler !

Refrain : Heigh-ho…Heigh-ho…
J’aimais bien mon boulot
Où est ce bâté gredin,
Qui m’a mis dans son jardin !

Le comble de l’indigence ! Une fois par an,
J’ai de la compagnie : un Père Noël, des rennes…
On nous met des guirlandes, des lumignons…
Et le soir, je clignote… Quelle mise en scène…
Les passants s’extasient … ou se marrent… c’est selon …

Refrain : Heigh-ho…Heigh-ho…
J’aimais bien mon boulot
Où est ce bâté gredin,
Qui m’a mis dans son jardin !

Reverrais-je un jour mon conte de fées ?
Ma Blanche-Neige, ma reine, mes frères ?
Dans le vent, la pluie, je suis tout délavé,
Mon bonnet pointu, n’est plus aussi fier…
J’ai froid, j’ai peur tout seul, je vais pleurer…. !

Refrain : Heigh-ho…Heigh-ho…
Je veux retrouver mon boulot !
Je vais lui faire la peau, au gredin,
Qui m’a emprisonné dans son jardin !



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Mercredi 22 heures

C’est ce soir que les fêtes commencent, elles vont durer quatre jours.
Le roi Léon, la mascotte, apparaît au balcon de l’Hôtel de Ville. C’est le délire…La foule massée sur la place explose de joie. « Oui ! ces fêtes, ça va être super ! » se dit Xan, le catalan. Il est venu voir. Il connaît bien celles de Pampelone, et ses moments de folie… il sent qu’à Baïona, il va vivre les mêmes emportements…
Lily n’est pas très loin. Elle, est arrivée de Paris ce matin. Invitée par des amis, elle est venue en curieuse. Ces fêtes de Baïona, elle en a tellement entendu parler… Mais elle se sent mal, dans cette marée humaine…trop ! c’est trop !
Xan a repéré Lily. Il est ébahi par la douceur de son visage, la grâce de son corps, l’éclat de ses cheveux blonds. « Cette fille-là, elle est pour moi se jure-t-il ». Il cherche à se rapprocher d’elle, mais sans succès… La foule est trop dense. Bientôt Lily disparaît .

Jeudi 18 heures

Toute la journée Xan a cherché Lily. Il a arpenté la ville, suivi toutes les animations : défilé des Géants, spectacle de danses, courses de vaches… Rien ! pas de Lily. Le Catalan est désespéré : « ça n’aura été qu’un rêve !!!… » se dit-il.
Mais non ! la voilà, là ! dans l’église au concert. Elle est assise, trois bancs devant, ses cheveux blonds toujours aussi rayonnants. Mais comment l’approcher sans déranger les choristes ?
« Je vais la suivre » se dit-il. Après le concert, elle se dirige vers le match de pelote…Et là, il réussit à se placer dans la rangée, derrière elle. Il pourrait lui toucher les cheveux. Il l’admire, il en prend plein les yeux … Il la regarde si intensément que Lily se retourne… elle lui sourit. Xan sent son cœur bondir ! Mais comment l’aborder avec son français hésitant… et entourée comme elle est, par ses amis …

Vendredi 17 heures 30.

C’est au tour de Lily de remarquer Xan. Il joue avec les copains devant les cornes des vaches. Elle reconnaît son allure d’Espagnol et ses feintes devant la charge des bovins. Elle lui adresse un grand signe lorsqu’il l’aperçoit.
Xan n’hésite plus, il vient la rejoindre et l’invite à boire une sangria…l’occasion de mieux faire connaissance. Mais, pas facile de parler au bar avec les mouvements désordonnés de l’assistance soucieuse d’éviter les coups de corne. Les deux jeunes sont bousculés. Mais enfin, elle sait qu’il est Catalan, il sait qu’elle est Parisienne…
Plus tard au bal, ils vont mieux faire connaissance non seulement par la parole, mais aussi par leurs corps, dans des slows langoureux… Leur amour commence.


Samedi

Désormais ils ne se quittent plus. Après quelques heures de sommeil, ils se retrouvent, à midi, au réveil du roi Léon.
La cavalcade des Géants, escortée par les bandas, l’apéritif concert… ils partagent tout …
C’est au défilé de chars, le soir, que la pression populaire est la plus dense. Il fait chaud et la foule est un peu ivre de chaleur et de boisson !
Xan et Lily se tiennent par la main pour ne pas se perdre… Malgré cela, sur le pont Marengo, la marée humaine les sépare… elle les traîne, les entraîne loin l’un de l’autre. Ils se débattent, hurlent pour se rejoindre mais le son de leurs voix se perd dans le cri des autres… Douleur, fureur, rage… ils ne se retrouveront plus de la nuit…

Dimanche, le dernier jour.

Xan n’a pas dormi, il a perdu Lily. Il a sonné chez ses amis, Personne ne répond. Il ne sait plus où la retrouver. Il traîne, la mine défaite, l’œil hagard, loin de ses copains.
Il sait seulement que Lily doit repartir sur Paris aujourd’hui mais à quelle heure ?
De désespoir, il s’assied sur un banc de la salle des pas perdus, à la gare. Lily ne repartira pas sans qu’il la voie, mais encore ne faut-il pas dormir !
C’est en fin d’après-midi qu’elle arrive, enfin. Cœur en chamade il attend. Va-t-il s’avancer ? L’apercevra-t-elle ? Ca y est ! elle l’a vu ! Ils se précipitent l’un vers l’autre : ils se touchent, se palpent, se soudent … n’imaginant pas la joie de se retrouver…
Mais les pleurs arrivent bientôt … Xan tient le visage de Lily dans ses mains, ses yeux ruissellent, et à son tour il fond ! A nouveau ils se serrent l’un contre l’autre, ils sentent les larmes de l’autre, couler dans leur cou. Ils se promettent mille promesses : se téléphoner, s’écrire, se revoir…au plus vite…
Mais le train démarre, Lily grimpe, une baiser de Xan sur la main… main qui se lève pour un dernier adieu… et qui disparaît au détour de la voie…
Xan s’écroule sur un banc… à quoi bon la vie, à présent, sans Lily. Le soleil a perdu son éclat !
Lily pleure… Baïona !… elle y a laissé son cœur ! Tout à l’heure Paris sera tout gris !



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Tututt, oui ! c’est mon nom
Qu’a donné Margoton
Fillette coquine,
Cinq ans, la mutine.

Encore endormie
Près de moi se blottit.
Moment du gros câlin,
Dès le petit matin.

En milieu de journée
Je sors me promener
Cachez-vous, les mulots
Vous aussi les moineaux !

Je surveille mes proies
Dans le pré, accroupi
Lorsqu’elles sont près de moi
Vif argent, je bondis !

Margoton ! vois mes prises…
En colère, elle s’est mise
De son pied à frapper
Mon cul et j’ai miaulé …

La nuit, quand elle dort
Je retourne au dehors.
Le temps d’une amourette
Elles sont belles les minettes…

Lassé, au canapé
Je reviens m’allonger
En attendant Margoton
Et son nez si mignon !

vous dormiez ? Alors chut !
Excusez ce Tututt
Qui s’est trop bien réjoui…
Continuez votre nuit !


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Je vis dans un brouillard permanent. Je vogue dans ma maison en frôlant les meubles. C’est au son de leur voix que je me dirige vers les visiteurs. Les parcours en auto me donnent mal au dos : car ce brouillard m’empêche d’anticiper les virages, les accélérations, les freinages, les arrêts…

Vous l’aurez compris, je suis aveugle !

Je n’avais pourtant pas ce handicap à la naissance. C’est par un excès de diabète qu’il m’est arrivé, en pleine force de l’âge, à cette période où mes enfants, adolescents, avaient besoin de mon affection, de ma présence…

Inutile de vous dire que ce fut le noir total en moi ! Je restais des heures prostrée dans le canapé… A tel point que, Jean-Charles, mon mari, me retrouvait le soir dans la même position qu’il m’avait quittée le matin …Prostrée ! oui ! tel est bien le mot… Imaginez cette infirmité qui s’installe en vous…sans pouvoir y porter remède… Perdre la vue… c’est perdre la lumière, la couleur, les fleurs, les paysages, les visages…

Il m’a fallu du temps pour admettre, pour accepter cette non-voyance. J’en voulais à la terre entière, à Dieu lui-même ! Pourquoi moi ? Qu’avais-je fait pour que m’arrive ce malheur ? Pas de réponse ! seules les paroles éplorées des proches, des voisins… qui vous font autant de mal que de bien, car elles vous enferment dans un monde que seul, vous connaissez …

Mais la rencontre de personnes vivant ce même enfer m’a appris à vivre avec… Vivre avec c’est se dire qu’on ne peut pas laisser ses proches, son mari, ses enfants avoir pitié de leur femme, de leur mère. Il faut qu’ils en soient fiers…

C’est ainsi que j’ai appris à lire le braille… que j’ai réappris à refaire le lit sans un pli dans les draps… je me suis réorientée dans ma cuisine pour continuer à préparer les plats quotidiens et les desserts pour nos invités… sentir avec les doigts si il y avait de la poussière sur les meubles… apprendre à tricoter des pulls avec des motifs de couleur en différenciant les laines par le toucher et en comptant le nombre de mailles… j’ai appris à vivre dans un univers à moi, rien qu’à moi !

Mais j’ai voulu sortir de cet univers et retrouver des amis non-voyants. J’ai donné des leçons de braille. Je me suis inscrite dans des associations où j’ai rencontré par exemple un pianiste…, une chef de chœur en chorale…, des non-voyants bien intégrés chez les voyants.

J’ai voulu à travers ce témoignage vous faire découvrir mon quotidien brumeux. J’espère avoir réussi. Si vous rencontrez des non-voyants, je vous en prie, soyez simples…, ne détournez pas votre regard… adressez-vous directement à eux !

Gisèle.


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- Salut P’pa, salut M’man !
- Ah, c’est Dick ! dit Rita à John.
- Qu’est-ce qui t’arrive Dick ? Voilà six mois qu’on ne t’as pas vu ! ajoute John.
- Ah ! ne m’en parlez pas, répond Dick. La banque a été rachetée, du coup le service informatique a été liquidé, résultat 150 salariés mis à la porte !
- Tu n’as pas cherché autre chose, questionne la Maman, tu as une formation et une expérience pas négligeables quand même !
- Tu ne te rends pas compte de la galère en ville, des gens comme moi on en trouve à la pelle dans les rues. Alors si tu n’es pas pistonné… et encore un sacré piston… c’est même pas la peine d’essayer !
- Je vois que ta voiture est pleine de colis, tu déménages questionne le Père ?
- Tu l’as dit répond Dick ! La maison, nous n’avions pas fini de la payer et comme nous ne pouvions plus rembourser les prêts, on nous a carrément mis à la porte !
- Alors tu es à la rue s’inquiètent John et Rita de concert ? Et ta femme Monica ? Et ta petite fille Rita ?
- Ne m’en parlez pas ! répond le fils, les larmes aux yeux. A son tour Monica a été virée de sa boite d’Assurances. Alors pour survivre, on a décidé de retourner vivre chez nos parents, et Mary, la petite, a suivi sa mère !
- Mais comment allons-nous faire, dit Rita. Ici on n’aura pas assez Dick, pour te faire vivre !
- T’inquiète pas M’man, je trouverai bien des petits boulots de dépannage informatique chez vos copains paysans !
John répond gravement : « Tu sais vivre de la ferme, c’est du passé Dick ! A présent tous les agriculteurs ont un travail à l’extérieur. Nous, à notre âge, on s’en est lassé. Mais, comme dit ta mère, on en aura pas assez Dick, pour vivre à trois ! Bon, on va quand même pas te laisser à la porte, on vivra plus chichement. Tu nous aideras à faire un peu plus de jardin, nous élèverons quelques volailles de plus…
- Ah dit Dick, si seulement, on avait une ASSEDIC, comme en France !

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11 novembre 1918 - C’est en octobre 1914, le 25 , que les «  fedwebel » sont venus apprendre à Maria, que Ludwig son mari avait été tué, en terre ennemie, en France. Depuis, elle espérait que les troupes allemandes occuperaient ce pays, comme en 1870, et qu’elle pourrait retrouver sa tombe. Elle avait bon espoir de ramener son corps reposer au village, à Wasmanroth, près de Francfort.

Eduard, leur fils, va sur quatre ans. Elle entretient  avec lui, le souvenir de ce père qu’il n’avait jamais connu. Avec la signature de l’armistice, elle sait qu’elle ne retrouvera pas son aimé, son chéri, qu’elle ne pourra jamais plus retrouver le creux de son épaule, pour y reposer sa tête.

Elle devra continuer à conduire, toute seule, la ferme où ils se sont installés en 1910. Au pays, la révolution a chassé le Kaiser, l’avenir est sombre.

« Qu’allons-nous devenir, se dit-elle ? Et Eduard comment va-t-il grandir sans toi ? Où est ton épaule Ludwig ? ton sourire, ta chaleur, ta force, tes bras me manquent ! »


1942 - C’est de nouveau la guerre. Mais cette fois l’Allemagne a envahi la France. Elle est à Paris depuis deux ans.

Maria, aidée de Eduard, a réussi à la ferme. Le fils devenu grand est d’un bon secours à sa mère. C’est un vrai soutien de famille. Il y a quatre ans, il a épousé Thérèsa qui lui a donné un beau petit garçon Hans Pieter. C’est tout le portrait de son Grand Père Ludwig.

Mais Eduard a du rejoindre la Wehrmarcht. Depuis six mois il est stationné en France. Sur la demande expresse de sa mère, il s’est mis à la recherche de lieu de sépulture de son père. Il a enfin trouvé, c’est à Parcy-Tigny !

Depuis qu’elle le sait, Maria supplie qu’on la laisse y aller…Mais Eduard, lui déconseille. Les trains sont souvent bombardés, les chemins de fer sont régulièrement dynamités… C’est trop dangereux ! D’ailleurs, elle n’obtient pas le sauf-conduit et Eduard doit rejoindre le front russe.

Maria pleure, désespérée… Pourra-t-elle, un jour, venir prier sur la tombe de Ludwig ?


C’est pour son soixante-dixième anniversaire que son petit-fils et sa belle-fille lui ont payé le voyage. En 1964 l’Allemagne et la France sont enfin réconciliées !

Grâce aux notes laissées par Eduard, qui à son tour a été tué à Stalingrad, Hans Pieter et Thérèsa ont pu faire cette surprise à Maria.

Elle est enfin là entre les croix de bois, son cher Ludwig à ses pieds. Elle lui murmure : «  70 ans d’âge et seulement 4 ans de vie commune. J’aurais vécu plus de temps avec une ombre, qu’avec toi en chair et en os ! Tu vois maintenant c’est la paix et c’est heureux ! Mais toi pourquoi es-tu venu verser ton sang ici ? Pourquoi ? Pour qui ? Warum (pourquoi) la guerre ? ».

Maria, appuyée sur ses enfants pleure… et, sur cette terre apaisée, ses larmes vont rejoindre le sang de Ludwig !


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1900 :

Jules tenant son âne par la bride, arrive près du moulin. Jacquet, passant par là l’interpelle :
« Hé Jules, tu vas faire moudre ton grain ?
Eh oui répond l’autre
Sais-tu brave Jules que ce moulin est hanté !
Hanté ? que me chantes-tu là ?
Si, si la sorcière qui y habitait, y revient de temps en temps. D’ailleurs elle a fait pousser une haie de buis pour qu’on ne la voie pas venir… Et tiens-toi bien pour la noce du garçon, il y a une quinzaine, elle avait dit au marié : « même si tu ne m’invites pas, je serai là quand même… » Eh bien ! Tu me croiras si tu veux, lorsqu’on a fait développer les photos, le visage de la sorcière apparaît, on la voit en train d’embrasser le marié !
Ah ben ! si c’est ça marmonne Jules, je vais aller faire moudre mon blé au moulin de Rémy. J’ai pas envie que ma farine soit ensorcelée !

1920 :

Louiset revenu vivant de la « der des der », a épousé Marguerite, et il vient habiter dans la maison qu’on appelle le Moulin des Robert
«  C’est pas une sorcière qui va me faire peur, a-t-il dit. Dans les tranchées j’ai frôlé d’autres fantômes autrement plus dangereux ! »
La roue à aubes du moulin tourne toujours, mais c’est une scie à ruban qu’elle fait fonctionner maintenant .
Louiset s’installe comme scieur de long.

1940 :

L’ancien combattant est désespéré, la guerre est revenue sur les terres de France…
La maison, il l’a rehaussée, car avec Marguerite, ils ont huit enfants, il faut bien les loger. En ces temps troublés, des réfugiés du Nord sont venus s’abriter chez eux. La maison pleine, bruisse de toute part. Elle se réveille très tôt le matin et s’endort tard le soir …
A côté, si la rivière continue de chanter, le moulin, lui, s’est tu, la fée électricité l’a remplacé pour faire tourner la scierie.

1960 :

Louiset malade s’est retiré des affaires. C’est son fils Etienne qui, avec sa sœur Margot a repris le flambeau. Tous les deux sont revenus, avec leur famille, vivre auprès des parents. Il a fallu démonter la roue à aubes pour faire place à l’habitation. Au total dix enfants, leurs parents et les anciens, la maison ressemble de nouveau à une ruche…

1980 :
La maison, le Moulin des Robert, est silencieuse. Louiset est parti vers d’autres cieux. La scierie a été délocalisée, l’espace ici n’était plus suffisant… Au foyer, il y a toujours Marguerite. Margot est restée près d’elle, avec Maurice son mari, et ses cinq grands enfants.
Il fallait aménager l’ancienne habitation, l’adapter à la vie moderne… Marguerite refusant, Maurice a décidé de reconstruire un nouveau logement dans d’anciennes dépendances. L’ancienne demeure s’est ainsi, à nouveau agrandie.

2000 :
J’arrive au Moulin des Robert. Une annonce dans le journal, m’a appris qu’il était en location.
La Grand-mère, et sa fille Margot, ayant rejoint Louiset, les enfants installés, Maurice est tout seul. Il a trouvé asile dans d’autre lieu.
Quatorze pièces ? Cette maison est un vrai château, une vraie caserne !… Mais c’est bien, j’ai de quoi l’occuper …
La rivière qui continue de chanter, me raconte les baignades, les batailles d’eau qu’elle a vécues. Elle me semble dire : «  Viens, j’ai besoin d’entendre rire les enfants, tu verras il fait bon vivre ici ! Sinon, ça deviendra sinistre… comme du temps de la sorcière !… »

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Voici l’automne !

Les enfants courent dans la laie, ils s’aventurent dans les sous-bois !
Mathilde crie : «  Papa, Maman, venez voir, j’ai trouvé des cèpes ! ». L’œil gourmand, Sébastien se précipite : » Oui ! Ce sont bien des cèpes ! ». Aussitôt toute la troupe se précipite dans les fourrés et, chaque champignon induit un cri de victoire. Une belle omelette en perspective, ce soir !
Plus loin, sous les châtaigniers, Oscar s’évertue à dépouiller les bogues pour dégager les châtaignes, mais ça pique. Avec un morceau de bois, ou avec les pieds, il réussit à recueillir un bon sac de marrons. Cuits à l’eau ou au four, ils feront les délices des soirées passées devant la télé,.

Au virage de l’allée, c’est l’hiver !

Nous foulons la neige, chaussés de bottes, nous glissons sur le sol gelé. Mais c’est bientôt une bataille rangée de boules de neige qui se déclenche !
Mais Stop ! 4 à 5 biches s’avancent vers nous… surprises, elles font demi-tour au galop !
« Une trop belle photo à prendre ! » dit Béa, la maman. Mais l’appareil est resté à la maison !

Encore un tournant, nous sommes au printemps !

Les branches verdissent, les merles piaillent et se chassent dans le sous-bois, le coucou chante, les oiseaux travaillent dur pour bâtir leur nid ! …
Nous, nous cherchons le brin de muguet ! Carmen crie : «  Ca y est, j’en ai trouvé ! ». Une chance car les cueilleurs professionnels nous ont devancé depuis plusieurs jours.

Un nouveau détour et nous voilà en été !

Nous cheminons sous la voûte, en tenue légère, l’atmosphère est chaude ! Les papillons jouent dans la lumière et tracent des rayons de couleur au dessus des fougères.
Nous furetons au bord des allées, cherchant la fraise des bois ! Hortense trouve une bonne touffe de pieds ? Délicatement elle ramasse les petits fruits rouges pour venir les partager avec toute la famille : chaudes, bien sucrées et parfumées, un petit délice !

En ce dimanche après-midi d’automne, Sébastien traîne les pieds dans les feuilles mortes… le sol en est tapi ! Ce froissement lui ravive ses souvenirs…. Belle sa chienne, le précède fouinant dans les buissons, à la recherche des odeurs …

«  Les feuilles mortes se ramassent à la pelle,
Les souvenirs et les regrets aussi !

Il y a cinq ans, Béa, que tu nous as quitté pour l’éternité !

En ce temps-là la vie était plus belle
Tu vois je n’ai pas oublié… » chantait Montand !

Le poème de Prévert tourne et retourne dans le cœur de Sébastien.

« Toi qui m’aimais, moi qui t’aimais
Mais la vie sépare ceux qui s’aiment …
Comment veux-tu que je t’oublie… »

Il faut pourtant retourner à la vie quotidienne, demain une nouvelle semaine commence… Peut-être dimanche prochain, Sébastien, reviendra-t-il, à nouveau, traîner ses souliers dans les feuilles mortes …

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