(pour ceux qui préfèrent les textes imprimés, cliquez sur l’icone PDF:
———————————————————————————————–
Un jour mes parents décidèrent que les citadins chroniques que nous étions se devaient d’avoir une initiation aux joies de la campagne. J’avais 15 ans à cette époque là et je n’avais jusqu’alors connu que cette banlieue industrielle, sale et nauséabonde, où j’étais né.
Par une belle journée d’été, la voiture chargée au maximum, nous sommes partis très tôt pour éviter les embouteillages et rouler « à la fraiche ». Au milieu de l’après-midi nous sommes arrivés enfin dans le petit village jurassien d’Eternoz et avons trouvé sans difficulté la ferme du père H., dans laquelle nous étions logés pour un mois.
La ferme était assez vaste et hébergeait, en plus du propriétaire fermier, quelques ouvriers agricoles permanents ou saisonniers. Nous fîmes rapidement connaissance avec leurs enfants et ce sont eux qui nous enseignèrent les pratiques de la campagne. L’activité principale de la journée consistait à mener au pâturage une douzaine de vaches de race montbéliarde. Ce travail se révéla plus intéressant et plus ardu que prévu. L’absence de clôtures nous imposait un sérieux travail de surveillance car il ne s’agissait pas qu’elles aillent paître dans des champs de luzerne, herbe qui ballonnait leur ventre. Au bout de quelques jours nous nous étions distribué les tâches à tour de rôle et, pendant que le préposé du jour à la surveillance veillait, les autres jouaient dans les herbes folles.
L’un des garçons de la ferme avait « le béguin » pour ma sœur et nous nous en amusions beaucoup, jusqu’au jour où il lui proposa de lui faire « le coup du taureau ». Dans nos esprits de citadins nous n’y avons vu aucune connotation sexuelle et ma jeune sœur était dès lors terrorisée à l’idée d’une sorte de « corrida » dont elle serait la victime expiatoire.
Les matins où les nuages laissaient présager de la pluie, ma mère m’obligeait à partir avec un grand parapluie noir qui, replié, me servait de bâton de marche. Lorsque les gouttes de pluie se faisaient trop drues, un jeu que nous avions inventé consistait à construire un abri de fortune avec des branches sèches et des feuilles, puis de recouvrir le tout avec le parapluie. Nichés là-dessous nous étions au comble du bonheur en entendant les gouttes de pluie s’écraser sur la toile tendue du parapluie, isolés du monde extérieur. Le temps paraissait alors suspendu et me faisait entrevoir pour la première fois ce que devait être « l’Eternité ».
Un jour je me suis retrouvé seul dans l’abri avec Fanette, la fille d’un saisonnier, une « grande » de plus de seize ans, à la poitrine généreuse. Dans l’atmosphère confinée et humide de notre abri je retenais mon souffle, un peu pour masquer mon émoi, et aussi pour ne pas sentir la forte odeur corporelle de Fanette qui ne prenait qu’un bain par semaine, le dimanche avant la messe.
Vers 6 heures du soir nous devions rassembler les vaches qui paissaient dans le pré et les guider sur le chemin du retour à la ferme. Les animaux avaient leurs habitudes et faisaient gentiment semblant de nous obéir. L’entrée dans l’étable se passait généralement bien, sachant que la difficulté était que la porte relativement étroite ne permettait le passage que d’une vache à la fois. Une sorte de préséance établie entre elles facilitait les opérations. Seules une ou deux perturbatrices – toujours les mêmes – compliquaient quelquefois les choses.
Il fallait ensuite les attacher par une chaîne à leur emplacement dédié. Là aussi les « perturbatrices » mettaient quelquefois la pagaille en s’installant à la place d’une autre, entraînant des permutations en cascade. Lorsque le calme était revenu c’était l’heure de la traite. L’opération était le domaine exclusif des femmes de la ferme. Là aussi les vaches ont leurs habitudes et ne se laissent pas traire par des inconnus sans rechigner (queue fouettant, coup de pieds dans le seau, crottes, etc…) Fanette était la plus jeune trayeuse de la ferme.
La veille de notre départ Fanette trayait « la Coquette » (au bout d’une semaine nous avions appris les surnoms des douze vaches). Je m’approchais d’elle, admirant le jeu de ses doigts sur les pis. Comme d’habitude Fanette était légèrement vêtue et sa position, jambes écartées, penchée vers l’avant laissait découvrir largement ses seins et ses cuisses. J’étais moi aussi assez légèrement habillé et mon short de toile laissa facilement entrevoir une monumentale érection d’adolescent. Fanette me jeta un regard amusé et me promis d’un air entendu qu’elle s’occuperait de mon cas dès qu’elle en aurait fini avec la Coquette.
Pendant tout le temps que se poursuivi la traite je restais là, comme fasciné par les mains de Fanette. Je pensais à ces serpents qui commencent par hypnotiser leur future victime. J’étais comme l’une d’elle, attendant d’être dévoré.
Puis Fanette ayant rangé soigneusement son seau saisit ma main et m’entraina en dehors de la stalle, vers une botte de paille fraiche. Ses doigts, qui sortaient à peine de la traite, étaient tièdes et doux. Je n’osais pas la regarder et fixais obstinément mon regard sur la tête de « la Coquette ». Lorsque mon plaisir atteignit son paroxysme je vis la vache retrousser ses babines dans une sorte de sourire qui découvrait d’énormes dents jaunes.
Ainsi se termina en apothéose ce séjour initiatique à la campagne.
Il me fallut de nombreuses années et quelques partenaires pour que, dans ces moments « fatidiques », j’oublie de penser aux doigts de la Fanette et au sourire de la Coquette.
Jean
Aucun tag pour cet article.