C’est dans l’étable que c’est arrivé.
Mais bon, certainement que celà aurait pu arriver n’importe où ailleurs.
Quelque soit le moment, ou le lieu, rien ne l’arrête, pas même les gens qui le regardent
Il n’en a rien à faire, il est tout entier à sa mauvaise humeur, sa colère , sa frustration et tutti quanti..
Il a encore cherché l’affrontement.
Il la regardait avec son drôle d’air. L’air de celui qui n’est pas content.
Déjà, il venait de chercher des noises à son père, à propos de la gestion de la ferme.
" Tu es trop vieux, tu ne comprends rien aux techniques modernes", qu’il lui avait dit.
Quest-ce qu’il connait des travaux agricoles, lui qui a refusé de travailler sur l’exploitation?
Lui, il ne voulait pas se lever à l’aube et rentrer tôt  pour traire les vaches. Lui, il s’était instauré une vie légère et sans contraintes.
C’est d’ailleurs dans une soirée un peu folle, la veille du nouvel an qu’elle l’avait rencontré.
Il pétillait comme une bulle de champagne, c’était un tourbillon de joie de vivre cet homme là ! ..et il maniait un humour décapant qui l’avait subjuguée, elle qui se torturait le cerveau depuis des décennies à chercher un sens à sa vie.
Elle avait cru quoi? qu’à fréquenter des fétards, la vie serait une fête?
Ben justement,elle n’avait pas été longtemps à la fête avec lui.
"Les apparences sont toujours trompeuses" pensait-elle.
Très vite, il avait montré son côté sombre, sa seconde nature, elle lui disait" tu n’es qu’un shizophrène"
Il s’enfermait des heures dans des bouderies, fumait cigarette sur cigarette; il ne lui parlait plus , il aboyait.
Il lui donnait des ordres:" apporte-moi un café".. " apporte m’en un autre"
Il la prenait pour sa boniche ou quoi?
Et puis, plus rien n’allait bien, à croire qu’en quelques semaines elle était devenue idiote car à l’entendre lui, elle n’était jamais à la hauteur de rien.
Et en plus, il ne la trouvait pas "marrante"
C’est vrai çà, ses reprohes constants ne la faisait pas se tordre de rire.
Tout çà l’empêchait de dormir depuis quelque temps.
Elle ripostait aux attaques de reproches, aux tirs de colère, puis elle s’épuisait à recoller les morceaux épars de leur relation moribonde.
Elle s’accrochait désespérément à son puzzle mais il lui manquait de plus en plus de pièces pour le reconstituer; d’ailleurs on ne voyait plus bien à quoi çà ressemblait ce truc..
Qu’est-ce qu’elle attendait au fond?
L’histoire était cuite! elle le savait, alors quoi!
Et puis, c’est dans l’étable que c’est arrivé, chez son père, avec qui elle s’attardait à discuter pendant la traite; elle, elle aimait bien les vaches, la ferme, l’ambiance.
Il a commencé à s’énerver, à la presser de partir :
" Bon, tu viens ou non? quest-ce que tu peux bien avoir à raconter d’intéressant à mon père?"
Elle a senti d’un coup son sang lui monter au visage, puis s’est mise à trembler.
D’un bond elle s’est jetée sur lui.
Son poing droit serré à blanc heurta avec une violence inouïe son oeil à lui.
Sous le choc, il recula d’un pas.
Hagarde, elle regardait son propre poing.
Puis la honte l’envahit.
"Mon Dieu, comment j’ai pu en arriver là?" balbutia t-elle.
Elle leva les yeux vers lui; il la regardait avec une lueur de satisfaction ironique.
"Tu es pire que moi!" lâcha t-il, avec mépris. 
La douleur lui tordit le ventre " alors voilà, c’est l’ultime humiliation qu’il voulait m’infliger" se dit-elle.
Il avait réussi à l’ emmener là où elle pensait ne jamais mettre les pieds.
Electrochoc!
Elle savait maintenant que c’était fini.
Terminé.
Elle était déjà partie.
Rideau sur l’amour vache!

 

CM

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