C’était au temps du bon Roi Louis. La France était enfin en paix. Les Goddons ( les Anglais ) avaient été repoussés au-delà de la mer ; la Picardie vivait enfin tranquille et prospérait dans ses villes et ses villages.
Mais la frontière restait fragile car ces gueux d’Anglais restaient menaçants. Le Roi veillait à ce que ses barons et ses vassaux fassent bonne garde. D’ailleurs l’un d’entre eux l’inquiétait, le Comte Hugues qui séjournait à Soissons vieillissait. Fatigué par de nombreuses batailles, ses séjours dans les prisons anglaises, il avait perdu sa vigueur de chevalier, ses hommes d’armes n’étaient plus entraînés. Le Roi, était d’autant plus inquiet que dans sa succession le Comte n’avait pas d’enfant mâle. Seule une jouvencelle avait survécu, mais une jouvencelle sous un heaume, ça n’était pas sa place. Alors on la marierait ! Ce ne serait pas difficile car, quoique jeunette, elle était déjà fort belle. Louis dépêcha son émissaire, Godefroy de Chinon pour porter ce message au Comte Hugues et à son épouse la Comtesse Margot.
Au château de Soissons le messager du Roi fut reçu avec beaucoup d’honneurs.
« Quel message royal me portez-vous sire Godefroy ? s’enquit le Comte
- Le bon Roi Louis vous salue bien, répondit l’émissaire. Il vous fait dire qu’il a décidé de marier votre fille Gabrielle, afin que son époux fasse bonne garde sur cette frontière du Nord du Royaume.
- Mais pardieu, je suis encore bien vivant que je sache, rétorqua Hugues, vexé dans son amour-propre, et j’entretiens ici une bonne troupe d’hommes d’armes !
- Mon cher Comte précisa le messager ce n’est plus suffisant. De nouvelles armes arrivent, les goddons sont maintenant équipés de bombardes. Vos défenses n’y résisteraient pas . Il faut équiper votre château en conséquence.
Après d’âpres tractations le Comte se plia au désir du Roi, et avant de partir Godefroy ajouta : « Pour choisir parmi les valeureux chevaliers qui vous avoisinent, organisez donc un tournoi. Vous y inviterez Arnaud de Coucy et Tristan de Guise. Ce sont des jeunes et fiers chevaliers. Ils s’affronteront en joute et le meilleur épousera Gabrielle. »
Demoiselle Gabrielle, qui écoutait la conversation, fut saisie d’émoi, son cœur tressauta dans sa poitrine. Ainsi le Roi s’intéressait à elle ? Mais elle, elle n’avait pas encore envisagé les épousailles. Du haut de ses seize ans elle n’avait pas encore envisagé de partager sa couche avec un chevalier si beau soit-il. Mais s’il devait en être ainsi que Dieu y pourvoie !
Ainsi fut-il décidé que le Comte et la Comtesse de Soissons organiserait un tournoi à la St Jean. Comme la cour du Château était trop petite pour y tenir de tels jeux on décida d’utiliser le pré jouxtant l’abbaye de Valsery pour s’y ébattre…
Plusieurs mois à l’avance on invita les seigneurs des environs. Ainsi ceux de Reims, Troyes, Laon, Cambrai, Rouen, Beauvais, Noyon furent conviés à se joindre au tournoi avec les deux prétendants. Tous tinrent à s’inscrire, ce tournoi les sortirait de leur château où ils s’ennuyaient ferme en ces temps de paix.
Dans les jours qui précédèrent la St Jean on dressa des tribunes dans le pré. On Y accrocha de riches tapis, les pavillons, les bannières des seigneurs qui allaient s’affronter dans la lice. Celles de Coucy et de Guise y figuraient en bonne place. Tout au long de la semaine, les écuyers s’affrontèrent sur le pré.
Enfin le grand jour arriva… Le bon Roi Louis accompagné de la Reine Marie fit son entrée, escortés du Comte et de la Comtesse qui entourait Gabrielle. La damoiselle éblouissait la Cour, dans sa robe bleu azur ornée des plus belles pierreries.
Les serfs des environs s’étaient déplacés en grand nombre. Ils assistaient au spectacle derrière les palissades. Leurs vivats, pour saluer le Roi et la Reine, montaient dans le ciel.
Au son des fanfares, les chevaliers superbement équipés, accompagnés de leurs écuyers, tous à cheval, entrèrent en lice. Les joutes commencèrent et se succédèrent tout l’après-midi. Bien que saluées par de forts applaudissements tout le monde attendait la dernière joute celle que l’on appelait « la lance de la dame », celle où s’affronteraient Arnaud et Tristan, les prétendants de Gabrielle. …
Eperonnés les chevaux s’élancèrent … le choc fut rude entre les deux cavaliers, mais aucun ne fut désarçonné. Ce fut au troisième galop que Arnaud tomba sur le pré. Tristan fut alors, déclaré vainqueur à l’acclamation des voix.
Le soir au château, revêtu d’habits précieux, sous les regards du Roi et du Comte aux côtés de sa promise Gabrielle, Tristan, tout ému présida aux festivités du repas et du bal qui suivirent le tournoi.
Les épousailles furent décidées pour la St Michel. Et c’est ainsi que l’Evêque, Ogier, entouré des chanoines, reçut le consentement des époux dans sa cathédrale de Soissons.
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